Château Lagrange

Cap sur la plus vaste propriété de Saint-Julien, où l’arrivée sur le château ne laissera personne de marbre.

Histoire avec un grand H

Il faut remonter en 1607 pour trouver la première trace de la Seigneurie de Lagrange. À cette époque la propriété appartient à Jean de Vivien, écuyer de profession. Le château sera conservé dans le giron familial pendant près de deux siècles permettant de traverser les millésimes avec une grande constance.

Au fur et à mesure le château Lagrange voit sa renommée s’accroître, et c’est en 1842 que tout basculera. Le comte Tanneguy Duchâtel, alors ministre de l’Intérieur durant le règne de Louis Philippe 1er, va acquérir la propriété. Pendant 33 ans il ne cessera, avec sa femme, de faire évoluer le château.

Premièrement, en 1845, il va faire construire une tour de style toscan par le très célèbre architecte français Louis Visconti. Cette tour, accolée au cuvier, va rendre l’identité du château très singulière, faisant beaucoup parler par la même occasion.

Même si le temps était capricieux, cela n’enlève rien à la beauté de ce château.

Sa femme était férue d’art et d’horticulture, elle fera d’ailleurs ériger une serre afin de cultiver les fleurs qu’elle faisait parvenir de par le monde entier (signe de luxure pour l’époque). Lagrange devient donc le lieu où il faut être.

En récompense pour leur constant engagement quant au développement de la propriété, le château sera élevé au rang de troisième cru au sein du classement des vins du médoc en 1855. La superficie du domaine est alors de 118 hectares de vignes. Malheureusement en 1867 le comte Duchâtel décède, c’est alors que la propriété va faire face à de nombreuses crises et va ainsi agoniser petit à petit, voyant sa superficie passer de 118 à 56 hectares.

Le renouveau surviendra en 1983 lorsque la société Suntory, qui n’est autre que la plus vieille entreprise de fabrication et commercialisation de boissons alcoolisées du Japon, rachète le château. Dès le départ de gros investissements vont être entrepris en commençant par la replantation du vignoble afin de revenir aux 118 hectares historiques. De nouveaux travaux de rénovation seront entrepris, cette fois-ci, ils concerneront le cuvier et le chai. L’objectif est de remettre en état un outil de production à la hauteur de leurs exigences.

Depuis, de nouveaux investissements ont été fait quant à l’optimisation des énergies au sein des installations techniques (eau, électricité, etc.). Une quête constante d’excellence, qui est parfaitement illustrée par la devise de Suntory auprès de la propriété : « l’excellence sans compromis ».

Aujourd’hui la propriété est dirigée par Matthieu Bordes, accompagné de ses équipes. Chacun a son mot à dire, ici c’est l’humain avant tout. Une organisation des plus modernes dont le bien-être des employés est une priorité.

Le millésime 2023 célèbre donc le 40ème millésime depuis le rachat du château par Suntory.

Le vignoble et son terroir

Le vignoble s’étend donc sur une superficie de 118 hectares, d’un seul tenant. Une telle étendue de vignes fait du château Lagrange la plus grosse propriété en Saint-Julien.

À l’image de ses voisins, le terroir est idéal à la production de vins capables de traverser les décennies. Son sol est composé de graves sur sous-sol argilo-sableux. Les vignes sont réparties en 103 parcelles, situées sur le point le plus culminant de l’appellation. Étant assez éloigné de l’estuaire, le domaine est légèrement plus sensible aux gelées printanières, sans pour autant avoir de réel impact au vu de l’attention qui y est portée chaque année.

L’encépagement de la propriété est composé de 67% de Cabernet Sauvignon, 28% de Merlot et 5% de Petit verdot. Si dans les années 2000 la part de Cabernet ne représentait que 50% de l’assemblage en moyenne, de nos jours elle a été grandement revue à la hausse constituant environ 86%. Cette tendance à rehausser la présence de Cabernet Sauvignon dans l’assemblage est expliqué par le fait que les équipes du château affectionnent tout particulièrement ce cépage pour sa finesse de tanin et sa fraicheur.

À savoir que 11 hectares sont consacrés à la production de vin blanc. L’encépagement est de 80% de Sauvignon Blanc, 10% de Sauvignon Gris et 10% de Sémillon.

Un travail de la vigne en harmonie avec la nature

Avant-gardistes dès ses premières années, les divers propriétaires du domaine n’ont cessé de faire changer les mentalités en imposant leurs visions de la viticulture. Depuis l’arrivée de Suntory, le château Lagrange a pu obtenir plusieurs certifications prouvant l’engagement quotidien qu’ils ont quant au respect de leur vignoble et son terroir.

Première certification en 2005 avec Terra Vitis, prônant une viticulture responsable. Seconde certification en 2017 avec l’obtention de HVE3 (Haute Valeur Environnementale de niveau 3), poursuivant cette démarche toujours plus engagée.

Une approche guidée par leur volonté de vivre et travailler en harmonie avec la biodiversité du vignoble, tout en adaptant leurs méthodes de culture et en minimisant l’utilisation de produits chimiques et autres traitements phytosanitaires. De plus, des travaux de réfection du cuvier et du chai sont entrepris afin d’optimiser, et donc réduire, l’utilisation de l’eau, de l’électricité, mais aussi de la quantité de déchets issus de la vigne et de l’embouteillage. Enfin, tout est mis en place pour les employés afin que la qualité de vie au travail soit idéale (formation, rémunération, etc.).

Un cuvier en pleine rénovation

Contrairement à ses voisins, le château Lagrange n’a pas entrepris de travaux pour construire un nouveau chai mais a plutôt entamé de grosses rénovations. Comme expliqué dans la partie ci-dessus, l’objectif est de repenser et réduire l’utilisation des énergies telles que l’électricité ou l’eau.

Le cuvier se compose de 102 cuves inox thermo-régulées, ironie du sort le vignoble est morcelé en 103 parcelles de vignes. Malheureusement il n’y avait plus assez de place pour une 103ème cuve. D’ailleurs, dans le but d’optimiser au maximum les lieux, les cuves sont réparties sur deux étages ce qui est assez curieux au premier abord mais plus que pratique au quotidien.

Le travail au chai

À la sortie de l’été vient la période fatidique des vendanges où il est enfin temps de récolter le fruit tant attendu. Environ deux semaines durant lesquelles chacun y va de son coup de sécateur afin d’amener le plus rapidement possible les raisins en cuve.

Une fois la grappe vendangée, elle se dirige en direction des trieuses dans de petites cagettes. L’objectif est de conserver la fraicheur et la puissance aromatique des raisins.

Pour cela, les équipes sont réparties sur deux lignes. Tri manuel, égrappage puis tri optique, seuls les meilleurs raisins seront mis en cuve. Une sélection des plus exigeantes pour que chaque millésime soit la meilleure expression de son terroir.

En termes de technique de vinification, le château utilise le principe de la co-inoculation, c’est-à-dire qu’ils font débuter la fermentation malolactique pendant la fermentation alcoolique. L’intérêt de cette technique réside dans la maitrise que l’on va avoir sur le développement d’éventuelles bactéries durant la fermentation. De plus, le fait que chaque parcelle ait sa propre cuve permet une micro-vinification, ce qui va permettre d’apporter encore plus de précision lors de l’assemblage final.

Le château emploi à temps plein 5 œnologues et fait appel à Éric Boissenot en tant qu’œnologue conseil.

Des barriques à perte de vue au sein de ce chai des plus longilignes.

L’élevage va s’effectuer durant 18 à 21 mois en barriques de chêne provenant, en moyenne, de six tonneliers. Le grand vin 60% sera élevé en fût neuf et 40% en fûts d’un vin, le second quant à lui bénéficiera d’un élevage en fûts de chêne neuf pour 20% le reste étant en fûts d’un et deux vins.

Lorsque les barriques arrivent à leurs fins de vie au château, elles sont récupérées par Suntory afin de leur donner une seconde vie, notamment en les utilisant pour la production de whisky et autres spiritueux.

L’assemblage sera décidé en janvier, quelques mois avant la fameuse semaine des primeurs. La mise en bouteilles se fait au château, où, chaque année ce sont environ 500 000 à 700 000 bouteilles qui sont produites, dont 200 000 à 250 000 rien que pour le grand vin.

Avant-gardiste depuis ses premières heures, le château Lagrange ne cesse de faire parler de lui. Une propriété où, le bien-être de ses employés est au cœur des préoccupations, ne peut que produire des vins à son image. Élégance, délicatesse, puissance aromatique, les vins ont un caractère si singulier qui fait de Lagrange l’un des plus grands de son appellation. Le vignoble, vieux de ses 40 ans de moyenne d’âge, exprime parfaitement la splendeur de son terroir.


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